La Rue des Consuls à Rabat:
En commentaire à l'article sur le patrimoine de Rabat, Saïd Mouline m'avait adressé un article qu'il avait publié dans un journal national suite aux aménagements qui dénaturent jusqu'à aujourd'hui la rue des Consuls. En témognage à son action militante pour la protection du patrimoine en général et celui de Rabat en particulier. Etant donné sa longueur, je me propose de le publier en trois parties.
La Rue des Consuls à Rabat:
Entre bunker et pagodes (1)
Jadis les remparts almohades de Rabat, fiers et majestueux, solides et résistants aux intempéries depuis le douzième siècle, offraient de hautes et belles façades de couleur fauve. Cette couleur était celle de leur matériau, du béton de terre de deux mètres d'épaisseur, qui réagissait ainsi à la proximité de la mer et à l'humidité de l'air.
Des remparts de la même époque, édifiés en terre également et selon les mêmes technologies, avaient, à Marrakech par exemple, une autre couleur. Une couleur ocre; celle que prenait naturellement la terre dans une ville intérieure au climat sec et à la lisière du désert.
Les couleurs, comme les odeurs, les sonorités, les ambiances lumineuses, et au plan social, les attitudes des habitants, leurs accents linguistiques, leurs traditions vestimentaires, forgent, dans le temps, l'identité d'une ville, ses particularités spatiales et sociales, une sorte d'esprit des lieux. Identité que vivent et ressentent les habitants ou les visiteurs de passage; identité qui évolue lentement, dans la durée, sauf lorsque des actions brutales viennent bouleverser ces équilibres fragiles qui se sont tissés au cours des siècles entre un site , une cité et ses habitants.
C'est ainsi, par exemple que l'on a pu assister aux ravages d'interventions hâtives et intempestives, telles la déstructuration de la Place El Hdim à Meknès, la destruction de la Place El Feddan à Tétouan, la dénaturation de la Place de Bâb Ech-Chaâba à Safi, la dégradation de la Qasba de Taourirt à Ouarzazate, la folklorisation de la Qasba de Aït ben Haddou - classée pourtant patrimoine mondial -.
Les enceintes almohades de Rabat avaient donc une couleur fauve, telle qu'elle ressort de descriptions anciennes, de témoignages, de tableaux de maîtres. A cette couleur fauve s'est substituée, dans un premier temps, la couleur ocre caractéristique des murailles de Marrakech, (lors de travaux de 'rénovation' effectués entre Bâb er-Rouah et Bâb el Had en 1984, ainsi que du côté de Bâb el Bhâr un peu plus tard), puis, dans un deuxième temps, cette couleur ocre a laissé place à une pâleur livide, celle de la porte Bâb el Had et de la muraille à proximité de Bâb el Alou. Pâleur livide, fruit de leur toute récente 'restauration'.
Ces portes et ces remparts sont cependant classés monuments historiques. Statut qui, comme bien d'autres monuments historiques à travers tout le Maroc, ne les empêche nullement, au gré des humeurs d'on ne sait qui, de faire l'objet de projets fantasques, dans leur conception et leur exécution. Projets qui dénaturent leur valeur de témoignage et de patrimoine historique: un peu d'ocre par ci, pour faire carte postale, un peu de Beaubourg par là, pour faire galerie d'exposition, une erreur (?) de dosage de chaux qui blanchit les tours, portes, bastions et les fragments 'rénovés' de la muraille. Il y aurait beaucoup à dire sur la gravité des dommages que subit le patrimoine national, classé ou protégé. Mais ce sur quoi l'on peut le plus particulièrement s'interroger aujourd'hui, dans une démarche universitaire, citoyenne et non partisane, concerne les travaux en cours dans la Rue des Consuls.
La Rue des Consuls à Rabat:
Entre bunker et pagodes (1)
Jadis les remparts almohades de Rabat, fiers et majestueux, solides et résistants aux intempéries depuis le douzième siècle, offraient de hautes et belles façades de couleur fauve. Cette couleur était celle de leur matériau, du béton de terre de deux mètres d'épaisseur, qui réagissait ainsi à la proximité de la mer et à l'humidité de l'air.
Des remparts de la même époque, édifiés en terre également et selon les mêmes technologies, avaient, à Marrakech par exemple, une autre couleur. Une couleur ocre; celle que prenait naturellement la terre dans une ville intérieure au climat sec et à la lisière du désert.
Les couleurs, comme les odeurs, les sonorités, les ambiances lumineuses, et au plan social, les attitudes des habitants, leurs accents linguistiques, leurs traditions vestimentaires, forgent, dans le temps, l'identité d'une ville, ses particularités spatiales et sociales, une sorte d'esprit des lieux. Identité que vivent et ressentent les habitants ou les visiteurs de passage; identité qui évolue lentement, dans la durée, sauf lorsque des actions brutales viennent bouleverser ces équilibres fragiles qui se sont tissés au cours des siècles entre un site , une cité et ses habitants.
C'est ainsi, par exemple que l'on a pu assister aux ravages d'interventions hâtives et intempestives, telles la déstructuration de la Place El Hdim à Meknès, la destruction de la Place El Feddan à Tétouan, la dénaturation de la Place de Bâb Ech-Chaâba à Safi, la dégradation de la Qasba de Taourirt à Ouarzazate, la folklorisation de la Qasba de Aït ben Haddou - classée pourtant patrimoine mondial -.
Les enceintes almohades de Rabat avaient donc une couleur fauve, telle qu'elle ressort de descriptions anciennes, de témoignages, de tableaux de maîtres. A cette couleur fauve s'est substituée, dans un premier temps, la couleur ocre caractéristique des murailles de Marrakech, (lors de travaux de 'rénovation' effectués entre Bâb er-Rouah et Bâb el Had en 1984, ainsi que du côté de Bâb el Bhâr un peu plus tard), puis, dans un deuxième temps, cette couleur ocre a laissé place à une pâleur livide, celle de la porte Bâb el Had et de la muraille à proximité de Bâb el Alou. Pâleur livide, fruit de leur toute récente 'restauration'.
Ces portes et ces remparts sont cependant classés monuments historiques. Statut qui, comme bien d'autres monuments historiques à travers tout le Maroc, ne les empêche nullement, au gré des humeurs d'on ne sait qui, de faire l'objet de projets fantasques, dans leur conception et leur exécution. Projets qui dénaturent leur valeur de témoignage et de patrimoine historique: un peu d'ocre par ci, pour faire carte postale, un peu de Beaubourg par là, pour faire galerie d'exposition, une erreur (?) de dosage de chaux qui blanchit les tours, portes, bastions et les fragments 'rénovés' de la muraille. Il y aurait beaucoup à dire sur la gravité des dommages que subit le patrimoine national, classé ou protégé. Mais ce sur quoi l'on peut le plus particulièrement s'interroger aujourd'hui, dans une démarche universitaire, citoyenne et non partisane, concerne les travaux en cours dans la Rue des Consuls.
Commenter cet article